Le choix entre la SELAS et la SELARL est devenu une question centrale pour les professions libérales souhaitant structurer leur activité sous forme de société. Avocats, médecins, experts-comptables, architectes ou encore infirmiers libéraux sont de plus en plus nombreux à envisager la création d’une société d’exercice libéral afin d’allier flexibilité de gestion, protection patrimoniale et optimisation fiscale. En 2026, les différences entre SELAS et SELARL ne se limitent plus à la simple forme juridique : elles influencent profondément la gouvernance, la rémunération, le régime social du dirigeant et la stratégie de croissance de l’entreprise libérale. Comprendre les spécificités de ces deux structures est essentiel pour faire un choix éclairé et durable.
Comprendre les fondements : la société d’exercice libéral (SEL)
Une adaptation du droit des sociétés aux professions réglementées
La SEL, ou société d’exercice libéral, a été créée pour permettre aux professions réglementées d’exercer leur activité sous une forme sociétale tout en respectant les règles déontologiques propres à leur métier. Elle reprend les grandes caractéristiques des sociétés commerciales classiques (SARL, SAS, SA), mais les adapte aux spécificités des professions libérales. Ainsi, la SEL peut être constituée sous différentes formes : SELARL (société d’exercice libéral à responsabilité limitée), SELAS (société d’exercice libéral par actions simplifiée), SELAFA (forme anonyme) ou encore SELCA (forme en commandite).
Les grands principes de fonctionnement
La SEL permet à un professionnel libéral d’associer d’autres confrères ou investisseurs, tout en limitant sa responsabilité au montant de ses apports. Elle facilite la transmission, la croissance et la mutualisation des moyens. Cependant, le choix entre SELARL et SELAS modifie la manière dont la société sera gérée, la fiscalité appliquée et le statut du dirigeant. Ce choix doit donc être aligné sur la stratégie à long terme du professionnel et sur la nature de son activité.
La SELARL : le modèle classique de la profession libérale
Une structure rigoureuse et sécurisante
La SELARL est la forme la plus répandue parmi les professions libérales exerçant en groupe. Elle s’inspire directement du modèle de la SARL et impose une structure de gouvernance relativement encadrée. Les associés disposent de parts sociales proportionnelles à leurs apports et les décisions sont prises collectivement selon un formalisme défini par la loi et les statuts. Ce modèle rassure les professionnels attachés à un cadre de gestion stable et à une répartition claire des pouvoirs.
Le statut du gérant : un dirigeant majoritaire ou minoritaire
Le gérant d’une SELARL peut être majoritaire, égalitaire ou minoritaire selon la répartition du capital. Ce statut influence directement son régime social. Un gérant majoritaire relève du régime des travailleurs non-salariés (TNS), soumis à la sécurité sociale des indépendants, tandis qu’un gérant minoritaire ou égalitaire relève du régime général. Ce point est déterminant car il impacte le coût des cotisations sociales, le niveau de protection et la rémunération nette disponible. Les dirigeants majoritaires apprécient souvent la SELARL pour la souplesse de son régime TNS, moins coûteux en charges sociales que celui des assimilés salariés.
La fiscalité et la rémunération dans la SELARL
Par défaut, la SELARL est soumise à l’impôt sur les sociétés (IS). Les bénéfices sont imposés au niveau de la société, puis les dividendes éventuellement perçus par les associés sont soumis à la flat tax ou au barème progressif selon l’option choisie. Le gérant peut se rémunérer sous forme de salaire, déductible du résultat imposable, et percevoir des dividendes. Ce modèle fiscal est souvent perçu comme équilibré et adapté aux structures à forte rentabilité. Toutefois, la distribution de dividendes dans une SELARL gérée par un TNS est partiellement soumise à cotisations sociales, ce qui peut en réduire l’intérêt dans certains cas.
La SELAS : la flexibilité au service de la stratégie et de la croissance
Un modèle inspiré de la SAS, tourné vers l’innovation
La SELAS est la version libérale de la société par actions simplifiée. Elle séduit de plus en plus les professions libérales souhaitant bénéficier d’une grande liberté statutaire. Sa gouvernance repose sur un président, éventuellement accompagné d’un directeur général, et sur une organisation interne souple permettant d’adapter le pouvoir de décision à la réalité de l’activité. Cette flexibilité attire particulièrement les jeunes générations de professionnels qui recherchent des structures modernes, évolutives et compatibles avec une stratégie de croissance.
Le président de SELAS : un assimilé salarié au régime général
Le président d’une SELAS relève du régime des assimilés salariés, même s’il n’existe pas de lien de subordination. Ce statut ouvre droit à une protection sociale plus complète que celui du TNS, notamment en matière de retraite, de prévoyance et d’assurance maladie. En revanche, les charges sociales sont plus élevées. Ce modèle convient particulièrement aux dirigeants souhaitant privilégier la sécurité sociale et un statut aligné sur celui des cadres dirigeants des grandes entreprises. La SELAS permet également de faciliter l’entrée d’investisseurs extérieurs, grâce à la possibilité d’émettre des actions et d’organiser librement les droits de vote et de dividendes.
Fiscalité et optimisation de la rémunération dans la SELAS
Comme la SELARL, la SELAS est soumise à l’impôt sur les sociétés, avec la possibilité d’opter temporairement pour l’impôt sur le revenu sous certaines conditions. La rémunération du président est déductible du résultat, et les dividendes bénéficient d’un régime plus avantageux que dans la SELARL car ils ne sont pas soumis aux cotisations sociales des indépendants. Ce mécanisme offre aux dirigeants une marge d’optimisation fiscale plus importante, notamment dans les sociétés générant des bénéfices élevés. L’association entre un salaire modéré et des dividendes bien calibrés devient une stratégie de rémunération privilégiée en SELAS.
Comparaison approfondie : SELARL ou SELAS, quelle structure choisir ?
La gouvernance et la prise de décision
La SELARL offre un cadre strict, idéal pour des structures où les associés souhaitent une gouvernance partagée et encadrée. Les décisions importantes nécessitent souvent un vote collectif, garantissant un équilibre entre les partenaires. À l’inverse, la SELAS autorise une rédaction très libre des statuts, permettant d’attribuer les pouvoirs de décision à un ou plusieurs dirigeants selon les besoins. Cette flexibilité facilite la croissance et l’intégration de nouveaux associés, mais elle exige une grande rigueur dans la rédaction des statuts pour éviter les déséquilibres de pouvoir.
Le régime social du dirigeant
Le statut du dirigeant constitue l’un des critères les plus différenciants entre les deux structures. Le gérant majoritaire de SELARL bénéficie d’un coût social allégé mais d’une protection moindre, tandis que le président de SELAS dispose d’une protection complète au prix de cotisations plus élevées. Le choix dépend donc du profil et des priorités du professionnel : maximisation du revenu net immédiat ou sécurisation à long terme. Dans certains cas, l’évolution du chiffre d’affaires ou la perspective d’une association future peut justifier un passage de SELARL à SELAS.
La fiscalité et la distribution des dividendes
Sur le plan fiscal, les deux formes présentent des similitudes, mais la SELAS offre un avantage notable sur la distribution des dividendes. Ceux-ci échappent aux cotisations sociales, ce qui peut représenter un gain significatif pour les dirigeants à forte rentabilité. En revanche, la SELARL conserve un attrait pour les structures plus modestes grâce à un régime de rémunération TNS plus économique et une gestion administrative simplifiée.
La flexibilité juridique et la stratégie d’évolution
La SELAS se distingue par une adaptabilité presque illimitée. Elle est particulièrement adaptée aux activités libérales à fort potentiel de croissance, aux regroupements pluridisciplinaires et aux projets d’ouverture du capital à des investisseurs extérieurs. La SELARL, plus rigide, convient mieux aux structures à taille humaine, où la stabilité et la gouvernance collégiale priment sur la flexibilité. Le choix dépend donc de la vision stratégique du dirigeant et de la trajectoire de développement de son activité.
Les critères de choix pour le dirigeant libéral en 2026
Objectifs patrimoniaux et protection du dirigeant
Le premier critère de choix réside dans la volonté de protéger son patrimoine personnel tout en optimisant la rémunération. La SELARL offre une sécurité patrimoniale similaire à la SELAS, mais son régime social plus économique permet une meilleure maîtrise des charges. En revanche, la SELAS séduira les dirigeants attachés à une protection sociale de haut niveau et à une vision patrimoniale long terme intégrant la retraite et la prévoyance.
Vision de croissance et ouverture du capital
Les professionnels qui envisagent une croissance externe, une association progressive avec d’autres praticiens ou l’arrivée d’investisseurs privilégieront la SELAS. Sa structure en actions permet d’organiser librement les droits financiers et de faciliter les transmissions. La SELARL, bien que plus rigide, reste adaptée aux structures familiales ou aux groupes homogènes souhaitant conserver une gouvernance équilibrée et maîtrisée.
Pilotage fiscal et stratégie de rémunération
Le pilotage fiscal constitue le troisième axe de réflexion. En SELARL, la rémunération du gérant TNS reste avantageuse sur le plan social, mais les dividendes sont plus lourdement taxés. En SELAS, la stratégie peut s’appuyer sur un arbitrage plus fin entre salaires et dividendes, offrant des marges d’optimisation supérieures pour les sociétés rentables. Dans les deux cas, la qualité de la gestion comptable et le suivi fiscal restent déterminants pour maximiser la performance globale.
Conclusion
Le choix entre SELAS et SELARL dépasse la simple dimension juridique. Il conditionne la stratégie financière, la gouvernance et la capacité de développement de l’activité libérale. En 2026, les dirigeants doivent raisonner non seulement en termes de charges sociales ou d’impôt, mais surtout en cohérence avec leur vision d’entreprise. La SELARL demeure le choix de la rigueur et de la maîtrise, tandis que la SELAS incarne la modernité, la souplesse et l’ouverture. L’arbitrage idéal repose sur une analyse personnalisée, intégrant la situation du professionnel, son niveau de revenu, son projet d’association et sa tolérance au risque. Une chose est certaine : la structuration juridique est aujourd’hui un levier majeur de performance pour toute activité libérale ambitieuse.