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Congés payés : quand l’employeur peut-il dire non ?

Table des matières

Les congés payés sont un droit fondamental pour chaque salarié. En France, la législation garantit à tous les employés un minimum de 5 semaines de congés payés par an, accumulées à raison de 2,5 jours par mois travaillé. Toutefois, dans certaines circonstances, l’employeur peut donc refuser les demandes de repos ou proposer un report. Concrètement, dans quelles situations peut-on voir ses congés refusés ? Quels sont les délais et les recours offerts aux salariés en cas de refus injustifié ? 

I. Les circonstances où l’employeur peut refuser les congés payés

Les congés payés ont pour finalité d’assurer au travailleur le bénéfice d’un repos effectif. En tant que garant de la sécurité et de la santé de ses salariés, l’employeur ne peut pas faire obstacle à ce droit. Si certaines circonstances l’autorisent à refuser des congés payés, des conditions bien précises doivent être remplies.

Quelles sont les conditions pour refuser les congés payés des salariés ?

Le report possible des congés payés

L’employeur dispose d’un pouvoir de direction. En ce sens, il est responsable de l’organisation des congés payés au sein de l’entreprise. C’est donc à lui de veiller à ce que les salariés puissent effectivement prendre les journées de repos acquises.

La Cour de cassation l’a rappelé : « il appartient à l’employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d’exercer effectivement son droit à congé, et, en cas de contestation, de justifier qu’il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement » (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 6 juillet 2022, 21-12.223, Inédit). 

De fait, si l’employeur refuse, pour une raison légitime, les congés payés d’un salarié, il doit tout de même lui permettre d’exercer son droit pendant la période de référence. À défaut, un report des congés peut être proposé, mais il ne peut pas être imposé.

La décision ne doit pas être abusive

En qualité d’employeur, vous avez le droit de refuser la demande de congé de votre salarié, mais ce refus ne doit pas être considéré comme abusif. Certains motifs bien précis sont légitimes, quand d’autres vous exposent à des poursuites au conseil de prud’hommes (CPH). 

Ce qu’il faut donc retenir, c’est que toute décision de refus doit être justifiée et non abusive.

Quels sont les motifs légitimes de refus de congés payés ?

L’employeur peut donc refuser des congés payés, à condition de motiver le refus. Plusieurs justifications légitimes peuvent être avancées, notamment pour garantir le bon fonctionnement de l’entreprise.

Assurer la continuité du service

L’employeur peut légitimement refuser une demande de congés pour garantir la continuité des services de la société. La présence des salariés est cruciale pour maintenir le bon fonctionnement de l’entreprise, surtout dans des secteurs où toute interruption d’activité est préjudiciable, comme le domaine médical. 

Exemple

Dans une entreprise où tous les salariés souhaitent prendre leurs congés aux mêmes dates, l’employeur peut être contraint de refuser certaines demandes ou de les reporter pour maintenir l’activité. Cette pratique est courante et vise à garantir la continuité des opérations de l’entreprise.

Une augmentation de l’activité de l’entreprise

En période de forte activité, l’employeur peut solliciter les salariés pour reporter leurs congés. Certains secteurs connaissent des pics d’activité à certains moments de l’année et doivent concentrer leurs efforts durant ces épisodes. 

Exemple

Amélie, vendeuse dans un magasin de vêtements, a demandé un congé en juillet. Or, cela tombe pendant les soldes d’été. Son employeur lui a proposé de décaler ses vacances à une période moins chargée, comme en août, pour assurer le bon fonctionnement du commerce pendant les soldes.

Les circonstances exceptionnelles

L’employeur peut également invoquer des circonstances exceptionnelles pour refuser des congés. Il peut s’agir de situations où la présence du salarié est indispensable, comme lors d’une commande inhabituelle ou pour faire face à des difficultés économiques. Il n’existe pas de liste exhaustive de telles circonstances, et chaque cas est examiné individuellement par les tribunaux en cas de litige.

Exemple

Un employeur peut refuser des congés à un salarié en raison d’un redressement judiciaire où la mobilisation de tous les effectifs est nécessaire pour assurer la survie de l’entreprise.

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II) Les cas où l’employeur ne peut pas refuser les congés payés

Il y a des circonstances dans lesquelles l’employeur ne peut pas s’opposer à la demande de congés du salarié.

Les congés incontournables : quels sont les droits du salarié ?

Décès, mariage, naissance

Si le congé concerne un événement familial, alors l’employeur ne peut s’opposer à l’absence du salarié. Concrètement, dans des situations comme le décès d’un proche, un mariage ou la naissance d’un enfant, aucun refus de congé payé ne peut être émis par l’employeur.

En revanche, le salarié doit fournir une attestation afin de justifier son absence (certificat de décès, d’un acte de naissance ou encore de mariage, d’une convention de PACS, etc.).

Examens pour les alternants

En plus des congés payés « classiques », les étudiants en contrat d’apprentissage bénéficient d’un droit à un congé de 5 jours ouvrables supplémentaires pendant l’année des épreuves terminales du diplôme. Ce congé doit être pris dans le mois précédant les examens et garantit le maintien de sa rémunération. Dans ce cas, l’employeur est tenu de libérer l’apprenti.

Il ne faut pas confondre ce congé « révisions » avec le droit au congé pour examen. Les alternants doivent en effet se présenter aux examens du diplôme stipulé dans le contrat d’apprentissage (Article L6222-34 du Code du travail). Là aussi, l’employeur doit libérer l’apprenti pour le temps nécessaire à la passation de ses épreuves, et ce sans perte de salaire.

Congés pour les couples travaillant dans la même entreprise

Si un couple travaille dans la même entreprise et souhaite prendre des congés en même temps, l’employeur ne peut pas refuser cette demande. Sur cette question, l’article L3141-14 du Code du travail stipule que « Les conjoints et les partenaires liés par un pacte civil de solidarité travaillant dans une même entreprise ont droit à un congé simultané ».

Les obligations de l’employeur en termes de communication des périodes de congés

L’employeur doit informer les salariés des périodes de congés deux mois avant leur ouverture. De plus, il ne peut pas changer les dates accordées moins d’un mois avant le départ prévu, sauf en cas de circonstances exceptionnelles (Article L. 3141-15 du Code du Travail).

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III) Les délais et conséquences en cas de refus

Absence de délai légal pour refuser les congés payés

Sur le plan législatif, il n’y a pas de délai légal pour refuser les congés payés, mais l’employeur doit toutefois informer chaque salarié individuellement du refus ou de l’acceptation dans un délai raisonnable. 

Dans tous les cas, le droit du travail précise que l’ordre des départs fixé par l’employeur doit être communiqué à chacun un mois avant son absence. Après ce jour, il ne peut plus modifier les dates définies, sauf circonstances exceptionnelles.

Les conséquences pour le salarié en cas de refus de congés

L’absence de réponse de l’employeur

Si l’employeur ne réagit pas une demande de congés, le premier conseil est de le relancer pour obtenir une réponse. En l’absence de retour, le départ peut être interprété comme accepté, surtout s’il avait connaissance des dates de repos. La jurisprudence a en effet estimé qu’une absence de refus explicite correspondait à un accord tacite de l’employeur (Cass. soc., 6 avril 2022, n° 20-22.055). Cependant, il convient de s’assurer que la requête a bien été communiquée et qu’aucun refus explicite n’a été émis.

Le refus tardif de congés payés par l’employeur : que faire ?

Un mois avant le départ, les dates de congés ne peuvent plus être modifiées. Deux cas de figure existent : 

  • Le salarié obtient un refus de l’employeur en dernière minute (par exemple, la veille du départ) : dans ce cas, le salarié ne commet pas de faute en partant.
  • Le salarié a obtenu l’accord des congés, mais l’employeur modifie le planning en raison de circonstances exceptionnelles moins d’un mois avant le départ. Dans ce cas, l’employeur doit informer au plus tôt le salarié concerné par la modification des dates de congés payés. En cas de litige entre l’employeur et le salarié sur le bien-fondé de ce refus tardif, les motifs invoqués sont évalués au cas par cas par les juges. 

Partir en congé malgré un refus légal

Un salarié décide de s’absenter après un refus explicite de l’employeur ? Cette situation est considérée comme une absence injustifiée et peut entraîner des sanctions disciplinaires, voire un licenciement pour faute grave, assimilé à un abandon de poste. 

Les risques encourus par l’employeur en cas de refus abusif

En cas de refus abusif d’une demande de congés payés, l’affaire peut être portée devant le Conseil de prud’hommes pour réclamer des dommages et intérêts. En outre, les sanctions en cas de refus injustifié consistent en une amende (contravention de cinquième classe) pouvant atteindre 1 500 euros (Article R3143-1 du Code du travail). Toutefois, il lui incombe de prouver devant le juge qu’il a pris toutes les dispositions nécessaires pour vous permettre de jouir de vos congés payés.

Fort heureusement, ces situations restent rares. Le strict respect des droits des salariés et un dialogue constructif entre les différentes parties permettent dans la plupart des cas de trouver des accords satisfaisants pour chacun en matière de congés payés. L’employeur peut donc refuser certains congés payés, mais pour des motifs légitimes et dans certains délais.

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