Depuis janvier 2025, les entreprises françaises réalisant des échanges commerciaux avec les États membres de l’Union européenne doivent se conformer à un dispositif réformé et plus structuré en matière de déclarations. La traditionnelle déclaration d’échange de biens (DEB) a évolué pour devenir un mécanisme à deux volets, distinct mais complémentaire, comprenant désormais un état récapitulatif fiscal et une enquête statistique EMEBI (Enquête Mensuelle sur les Échanges de Biens Intra-UE). Cette refonte répond à un double objectif : renforcer la fiabilité des données économiques transmises à l’administration et garantir une conformité totale aux directives communautaires en matière de TVA intracommunautaire. Ce guide complet détaille les nouvelles obligations légales, les seuils d’assujettissement, les bonnes pratiques et les stratégies de conformité à adopter. GT EXPERTISE, cabinet d’expertise comptable à Paris, accompagne les entreprises dans la mise en œuvre opérationnelle de ces obligations fiscales et douanières, afin d’assurer la conformité et l’optimisation de leurs échanges intracommunautaires.
Évolution de la DEB : vers une double déclaration plus ciblée
Jusqu’à la fin de l’année 2021, la déclaration d’échanges de biens fusionnait dans un même document deux types d’informations distinctes : les données statistiques collectées par les douanes et les informations fiscales nécessaires à l’administration de la TVA. Depuis 2022, la France a entrepris une réforme structurelle afin de se conformer aux pratiques déjà en vigueur dans de nombreux États membres de l’Union européenne. Cette réforme s’est concrétisée par la scission de la DEB en deux obligations déclaratives autonomes, à savoir une enquête statistique (EMEBI) et un état récapitulatif fiscal. Désormais, les entreprises réalisant des opérations commerciales intra-UE doivent remplir d’une part l’EMEBI, transmise à l’administration des douanes, et d’autre part l’état récapitulatif de TVA, destiné à la Direction générale des finances publiques (DGFiP).
Cette distinction offre une meilleure clarté des finalités : l’enquête EMEBI vise à collecter des données macroéconomiques sur les flux physiques de marchandises afin d’alimenter les statistiques du commerce extérieur, tandis que l’état récapitulatif de TVA poursuit un objectif fiscal de contrôle et de sécurisation des échanges intracommunautaires. En renforçant la granularité des informations transmises et la spécialisation de chaque volet, l’administration entend mieux surveiller les flux commerciaux intra-UE et prévenir les risques de fraude à la TVA.
Les entreprises concernées par la nouvelle DEB
Toutes les entreprises établies en France et réalisant des échanges de biens avec d’autres pays de l’Union européenne sont désormais concernées par ce nouveau dispositif. Toutefois, l’obligation de déclaration dépend du type d’opération (introduction ou expédition) et du volume des transactions. Pour les introductions, c’est-à-dire les acquisitions intracommunautaires, l’obligation de réponse à l’enquête statistique EMEBI est conditionnée au dépassement du seuil de 460 000 euros d’achats au cours de l’année civile précédente ou en cours d’année. Ce seuil constitue un critère d’assujettissement strict, déterminant l’obligation statistique.
En revanche, pour les expéditions, c’est-à-dire les ventes intracommunautaires, l’obligation fiscale est immédiate dès le premier euro de transaction, tandis que la participation à l’enquête EMEBI dépend du même seuil que pour les introductions. Ainsi, toutes les entreprises exportant des biens vers l’Union européenne doivent obligatoirement établir un état récapitulatif de TVA, indépendamment de leur taille, mais seules celles dépassant le seuil défini doivent fournir des données statistiques détaillées à l’administration des douanes. Cette distinction renforce la proportionnalité du dispositif et permet un ciblage plus efficace des entreprises les plus actives dans les échanges intra-UE.
Quelles informations fournir dans l’enquête EMEBI ?
L’enquête EMEBI requiert la transmission d’un volume important d’informations précises relatives aux flux physiques de marchandises échangées au sein de l’Union européenne. Chaque entreprise concernée doit fournir des données exhaustives telles que le code marchandise (nomenclature combinée à 8 chiffres), le pays d’origine et de destination, la valeur statistique et la valeur fiscale, ainsi que le régime douanier de l’opération (introduction ou expédition). La déclaration inclut également la masse nette, les unités supplémentaires, la nature de la transaction (vente, achat, transfert de stock, don, etc.), le mode de transport utilisé, le département d’expédition ou de réception, et le numéro de TVA intracommunautaire du client ou du fournisseur.
Cette richesse d’informations permet à l’administration de dresser un panorama précis des échanges économiques intra-UE et de disposer d’outils performants pour la détection de schémas frauduleux. L’EMEBI constitue ainsi un outil essentiel de pilotage économique et de surveillance douanière. Une déclaration incomplète ou erronée peut fausser les statistiques nationales et exposer l’entreprise à des sanctions. C’est pourquoi une rigueur absolue dans la saisie des données est nécessaire, de préférence sous le contrôle d’un expert-comptable spécialisé en commerce intracommunautaire.
Rôle et modalités de l’état récapitulatif de TVA
En parallèle de l’enquête EMEBI, l’état récapitulatif de TVA demeure une obligation fondamentale pour toutes les entreprises réalisant des livraisons intracommunautaires (LIC). Cette déclaration, transmise chaque mois via le portail en ligne DEBWEB, permet à l’administration fiscale d’identifier les opérations exonérées de TVA conformément à la directive européenne sur la fiscalité des échanges intra-UE. L’entreprise doit y indiquer le numéro de TVA intracommunautaire de chaque client européen, ainsi que le montant total des ventes réalisées au cours de la période.
Contrairement à l’EMEBI, cette obligation ne dépend d’aucun seuil : elle s’applique dès la première livraison intracommunautaire, même pour un montant symbolique. Cet état récapitulatif joue un rôle central dans la lutte contre la fraude dite « carrousel de TVA » et permet une meilleure traçabilité des flux commerciaux. Le respect scrupuleux des délais et l’exactitude des informations communiquées sont donc primordiaux pour garantir la conformité fiscale et éviter tout redressement ultérieur.
Nouveautés de la DEB depuis 2025 : ce qui change
À compter du 1er janvier 2025, plusieurs ajustements significatifs ont été introduits afin d’harmoniser le dispositif français avec les standards européens. Le pays d’origine doit désormais être systématiquement renseigné pour toutes les expéditions, quelle que soit leur nature. L’identifiant TVA du client devient obligatoire pour le régime 29, qui concerne notamment les ventes à distance BtoC, les opérations de sous-traitance ou de façonnage, ainsi que les transferts de stocks. De plus, les entreprises ne peuvent plus déposer plusieurs déclarations distinctes pour une même période de référence : la centralisation est désormais exigée pour renforcer la cohérence des données. Enfin, les déclarations à zéro ne sont plus systématiquement requises, allégeant les obligations pour les entreprises inactives sur une période donnée.
Ces évolutions visent à simplifier les procédures administratives tout en renforçant la fiabilité et la comparabilité des données au niveau européen. Elles traduisent une volonté de moderniser les outils de collecte et d’optimiser la supervision des échanges de biens intra-UE.