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Distribuer des dividendes : comment procéder ?

Table des matières

La date butoir de l’assemblée générale ordinaire annuelle d’approbation des comptes -AGOA- arrive bientôt, puisque dans la majorité des cas celle-ci est tenue le 30 juin de chaque année. En effet, la plupart des sociétés font coïncider la date de clôture de leur exercice social avec l’année civile. Or, les sociétés doivent, dans les 6 mois, de la date de clôture de l’exercice social, réunir l’assemblée générale ordinaire annuelle, afin que celle-ci se prononce sur les comptes annuels de l’exercice écoulé.

A cette occasion, plusieurs questions sur le fait de distribuer des dividendes nous sont posées par nos clients, dont les principales sont ci-après répertoriées :

I. COMMENT LES ASSOCIÉS PEUVENT-ILS SE DISTRIBUER DES DIVIDENDES?

À cette question, plusieurs réponses peuvent être apportées. Tout d’abord, il convient de souligner qu’il existe une notion de distribution régulière de dividendes, autrement dit des règles à respecter dans le cadre de la distribution de dividendes dont le non-respect entraîne un certain nombre de sanctions.

En effet, les associés ne peuvent se répartir sous forme de dividendes les bénéfices réalisés par la société, sans en principe passer par une décision collective des associés statuant en ce sens. Autrement dit, c’est l’AGOA des associés d’approbation des comptes annuels qui donne naissance aux dividendes, car les dividendes n’ont pas d’existence juridique avant l’approbation des comptes annuels par une décision collective des associés, la constatation par celle-ci de l’existence de sommes distribuables et la détermination de part qui est attribuée à chaque associé.

Sous réserve de la procédure des acomptes sur les dividendes, une distribution de dividendes au mépris de la procédure décrite ci-dessus est constitutive du délit de distribution fictive de dividendes.

Afin que l’assemblée qui donne une existence juridique de dividendes soit valablement constituée, il convient de rappeler qu’un certain nombre d’informations ou de documents doivent être communiquées ou informées aux associés ou encore à d’autres personnes notamment, le cas échéant, les Commissaires aux comptes -CAC.

Au titre de ces informations ou documents, il convient de rappeler que les associés doivent être convoqués à cette assemblée 15 jours au moins avant la tenue de l’AG. Les documents ci-après désignés doivent leur être adressé ou tenus à leur disposition au siège social :

          Les comptes annuels ;

          L’ordre du jour ;

          Le texte de résolutions ;

   Le cas échéant, le rapport de gestion, les rapports du CAC ainsi que les comptes consolidés ;

          Le cas échéant, le rapport de gestion du groupe et le rapport du CAC sur les comptes consolidés ;

          Le cas échéant, le rapport spécial sur les conventions réglementées 

Si la société a désigné un CAC, celui-ci doit également être convoqué 15 jours au moins avant la date de l’AG. Cette convocation prend obligatoirement la forme d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception.

On doit mettre à la disposition du CAC, dans un délai d’un mois, avant la date de l’AG les documents ci-après désignés :

          Les comptes annuels ;

          Le cas échéant, les comptes consolidés ;

          Le cas échéant, le rapport de gestion ;

          Le cas échéant, le rapport de gestion du groupe ;

Si un CSE- Comité social et économique – a été mis en place, dans les entreprises employant 50 salariés au moins, un certain nombre de documents doit être mis à la disposition du CSE, notamment : les comptes annuels.

Il convient de rappeler que dans ces entreprises, deux membres désignés par le CSE et appartenant l’un à la catégorie des cadres techniciens et agents de maîtrise, l’autre à la catégorie des employés et ouvriers, peuvent assister aux assemblées générales.

Il convient également de rappeler que le CSE a le droit de requérir l’inscription de projets de résolution à l’ordre du jour des assemblées générales.

II. A QUELLE DATE A LIEU LA DISTRIBUTION DE DIVIDENDES ?

Comme nous venons de l’indiquer, la distribution de dividendes ou la décision des associés sur l’affectation du résultat distribuable a lieu dans les 6 mois de la date de clôture de l’exercice social, conformément aux clauses statutaires, sauf prorogation dudit délai par décision du Président du tribunal de commerce statuant sur requête.

Ainsi, à titre d’exemple, si l’exercice social coïncide avec l’année civile, la date de clôture de l’exercice social sera donc le 31 décembre. Dans ce cas, la distribution de dividendes doit avoir lieu dans les 6 mois de cette date.

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III. DANS QUEL DÉLAI A LIEU LE PAIEMENT DE DIVIDENDES ?

La date limite de paiement des dividendes doit intervenir dans le délai de 9 mois de la date de clôture de l’exercice social, sauf prorogation dudit délai par décision du Président du tribunal de commerce statuant sur requête.

Il convient de rappeler que les dividendes non réclamés sont prescrits à l’issue du délai de droit commun de 5 ans. Ce délai commence à courir à compter de la date de la décision collective des associés ayant décidé de distribuer les bénéfices sous forme de dividendes.

IV. LES ASSOCIÉS PEUVENT-ILS SE DISTRIBUER DE DIVIDENDES SANS PASSER PAR L’AGOA ?

En principe, la procédure normale de distribution de dividendes est celle qui est autorisée par une décision collective des associés réunis en assemblée générale ordinaire annuelle. Mais, de façon exceptionnelle, les associés d’une société peuvent se distribuer des dividendes en ayant recours à la procédure dite des acomptes sur dividendes.

Cette procédure est réglementée par l’alinéa 2 de l’article L. 232 – 2 du code de commerce. Elle permet aux associés de toucher un acompte sur les dividendes, c’est-à-dire sans attendre la clôture de l’exercice social.

Toutefois, pour que cette distribution exceptionnelle de dividendes puisse se réaliser de façon régulière, il est nécessaire de respecter la réglementation relative à la procédure d’acomptes sur les dividendes.

D’une part, il faut que le bilan de la société concernée soit certifié par un CAC. Si la société n’a pas désigné un CAC, il est impératif dans ce cas d’en nommer un, avec pour mission d’établir le bilan certifié.

D’autre part, le bilan certifié doit faire apparaître que la société, depuis la clôture de l’exercice précédent, après constitution des amortissements et provisions nécessaires, déduction faite s’il y a lieu des pertes antérieures ainsi que des sommes à porter en réserve en application de la loi ou des statuts et compte tenu du report bénéficiaire, a réalisé un bénéfice.

Enfin, le montant des acomptes ne peut excéder le montant du bénéfice mentionné dans le bilan certifié par le CAC.

Tout dividende distribué en violation de ces règles est un dividende fictif.

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V. Si des bénéfices sont réalisés, les associés peuvent-ils se l’attribuer intégralement ?

Si la société a réalisé des bénéfices, les associés peuvent se distribuer les bénéfices sous forme de dividendes.

Il existe tout de même des règles à respecter. Il convient, tout d’abord, de rappeler que l’affectation du résultat de l’exercice doit être décidée par la collectivité des associés réunie en assemblée générale ordinaire annuelle en vue de l’approbation des comptes annuels. C’est cette assemblée qui décide du sort des bénéfices réalisés par la société.

Ensuite, il faut respecter les règles relatives à la dotation de la réserve légale. En effet, il doit être prélevé un montant de 5% sur les bénéfices, dans la limite de 10% du capital social, afin de doter la réserve légale.

Si une réserve statutaire est prévue, il conviendra également de la doter.

En effet, la réserve légale ou statutaire est instituée dans le but de renforcer les capitaux propres de la société. Elles ont pour objet de résorber les pertes subies par la société.

Si ces règles sont respectées, les associés peuvent décider de se distribuer intégralement les dividendes dans la proportion de leurs participations dans le capital social ou dans le respect des clauses statutaires prévues à cet effet.

  • Si des bénéfices sont réalisés, les associés peuvent-ils décider de ne pas les distribuer sous forme de dividendes et de les reporter pour l’exercice ultérieur ?

Les bénéfices réalisés lors d’un exercice écoulé font l’objet d’une décision d’affectation par la collectivité des associés réunie en assemblée générale ordinaire annuelle laquelle décide de leur sort. Il appartient donc à celle-ci de décider s’il y aura ou non de distribution de dividendes ou si les bénéfices feront l’objet d’un report à nouveau pour l’exercice ultérieur. Les associés peuvent également décider qu’une partie seulement des bénéfices seront distribués aux associés sous forme de dividende, l’autre étant mise en réserve ou affectés au poste « report à nouveau ».

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VI. LORSQUE LA SOCIÉTÉ A DÉCIDÉ DE DISTRIBUER DES DIVIDENDES, EST-IL POSSIBLE DE PAYER LES DIVIDENDES EN PLUSIEURS FOIS ?

Les dividendes constituent une créance de l’associé à l’égard de la société. Le représentant légal en est tenu de procéder à son paiement au profit de l’associé bénéficiaire, et ce, dans un délai de 9 mois à compter de la date de clôture de l’exercice social.

Si un consensus existe entre la société et l’associé sur la modalité de paiement des dividendes, rien ne s’oppose donc à ce que le paiement ait lieu en plusieurs échéances.

Pour éviter tout conflit entre les 2 parties (société et associé), il conviendra de formaliser cet accord par un écrit signé des 2 contractants.

Il conviendra également de vérifier que les statuts ne s’opposent pas à cette modalité de mise en paiement des dividendes.

Il convient de rappeler que les dividendes ne peuvent être réglés en espèces au-delà de 1000 euros (C. mon. fin., art. L. 112-6 et D. 112-3).

VII. SI LA SOCIÉTÉ A RÉALISÉ DES PERTES, COMMENT AFFECTER LES PERTES ?

Si des pertes ont été enregistrées lors d’un exercice social, il appartient à la collectivité des associés de décider de leur sort. Le plus souvent, les déficits font l’objet d’un report à nouveau. Mais, ils peuvent également être résorbés par les bénéfices ayant fait l’objet d’un report antérieur. Les associés peuvent également utiliser les fonds de la réserve légale pour les éponger.

Il est également possible, sous un certain nombre de conditions, d’opter pour le report en arrière d’un déficit.

Si les pertes subies rendent les capitaux propres inférieurs à la moitié du capital, les associés doivent, dans un délai de 4 mois à compter de la date de l’assemblée générale le constatant, statuer sur la continuation de l’exploitation ou sur la dissolution de la société.

En cas de continuation d’activité, les associés ont un délai de 2 ans pour reconstituer les capitaux propres ou pour procéder à une réduction du capital social.

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VIII. EST-IL POSSIBLE DE PAYER LES DIVIDENDES EN ACTIONS OU EN NATURE ?

Il s’agit ici d’une question à la fois intéressante et délicate à résoudre.

 En effet, le paiement de dividendes a lieu en principe en numéraire. Le paiement en nature n’est possible que si un certain nombre de conditions sont réunies.

Tout d’abord, il faut que cette possibilité soit prévue dans les statuts. Ensuite, si cette modalité de paiement est mise en œuvre (utilisée), il faut que l’associé qui reçoit ce mode de paiement en soit informé.

Le paiement en nature autre qu’en action est également possible, mais à la condition que l’associé concerné l’ait accepté.

IX. QUEL EST LE RÉGIME FISCAL APPLICABLE AUX DIVIDENDES ?

Le régime fiscal des dividendes appelle de nombreuses observations. En effet, cela dépend de nombreux critères. S’agit-il d’une société de personnes ou d’une société de capitaux, autrement dit de société soumise à l’IR ou de société soumise à l’IS ? Les dividendes, sont-ils distribués à une personne physique ou une personne morale ?

Le cas d’une société soumise à l’IR

Pour être assujettie à l’IR, une société peut être y soumise de plein droit ou sur option. Les sociétés qui sont soumises de plein droit à l’IR sont par exemple : les SNC, les sociétés civiles, l’EURL ayant pour associé une personne physique, etc.

Sous certaines conditions, l’option pour l’IR est possible ; autrement dit, une société dite de capitaux peut, sous certaines conditions, opter pour être assujettie à l’IR.

S’il s’agit donc d’une société de personnes, ce n’est pas, en principe, la société elle-même qui est imposée directement, mais plutôt les associés qui sont imposés pour la part de bénéfices qui leur revient. C’est la raison pour laquelle on considère ces sociétés comme des sociétés « transparentes fiscalement ».

Si la société a réalisé des bénéfices, ceux-ci sont considérés comme directement appréhendés par les associés, même si la société n’a pas procédé à une distribution de dividendes. C’est la raison pour laquelle, les bénéfices réalisés sont fiscalement considérés étant distribués aux associés, alors même que la société n’a pas tenu son assemblée générale ordinaire annuelle. C’est la raison pour laquelle également, les associés sont directement imposés pour la quote-part leur revenant conformément à la répartition du capital social.

Dans la mesure où les bénéfices ont déjà été imposés lors de leur réalisation, il n’y aura donc pas une seconde imposition lorsque la société décide, à l’occasion de son AGOA, de distribuer aux associés des dividendes.

Le cas d’une société soumise à l’IS

En revanche, en présence d’une société dite de capitaux, c’est la société elle-même qui est directement imposable à l’IS. Les associés ne sont imposés que s’ils touchent des dividendes.

Les sociétés de capitaux sont, en règle générale, les sociétés dans lesquelles la responsabilité des associés est limitée au montant de leur apport. C’est le cas, par exemple, des SARL, des sociétés par actions : SA -société anonyme, SAS -société par actions simplifiée, SCS -société en commandite simple (pour la part revenant aux commanditaires), SCA -société en commandite par actions. Ces sociétés sont de plein droit soumises à l’IS. Toutefois, une société dite de personne peut, sous certaines conditions, opter pour l’IS.

Dans ces sociétés, si la société a réalisé des bénéfices, elle doit payer l’IS soit au taux normal (25 %) soit au taux réduit (15 %) réservé aux PME au sens du droit communautaire.

Si la société ne distribue pas de dividendes, les associés ne seront donc pas imposés.

Les dividendes sont distribués à un associé personne physique.

Si, en revanche, elle distribue aux associés les bénéfices réalisés au cours d’un exercice, dans ce cas, ces derniers sont imposables.

Si les dividendes sont distribués à un associé personne physique, le PFU – Prélèvement forfaitaire unique – sera applicable, sauf si l’associé personne physique a opté pour le barème progressif de l’IR. En effet, depuis le 1er janvier 2018, les dividendes distribués, par des sociétés soumises à l’IS à des personnes physiques domiciliées fiscalement en France, sont soumis au PFU au taux de 30 % (dont 12,8 % d’impôt sur les revenus, et 17,20 % de prélèvement sociaux).

Les dividendes sont distribués un associé personne morale.

Tout dépend de savoir si la société à qui les dividendes sont versés est une société soumise à l’IR ou une société soumise à l’IS.

Les dividendes versés à un associé personne morale soumise à l’IR sont déduits du résultat imposable pour être imposés entre les mains de l’associé personne physique dans la catégorie de revenus de capitaux mobiliers.

En revanche, les revenus distribués à une société soumise à l’IS sont imposables à l’IS.

Les dividendes sont versés à une société mère

Les dividendes versés par une société soumise à l’IS à une société mère pouvant bénéficier du régime des sociétés mères, peuvent, sur option, être exonérés d’IS, avec, cependant, la réintégration d’une quote-part de frais et charges égale à 5% du montant des dividendes exonérés. 

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En conclusion :

Lorsqu’une société a réalisé des bénéfices, elle peut décider de les distribuer sous forme de dividendes.

Mais, pour éviter tout problème, il convient de le faire en respectant les règles de l’art.

La première des choses, la distribution doit se faire de façon régulière, c’est-à-dire en suivant la procédure dite normale de distribution de dividendes.

Cela consiste à tenir l’assemblée générale ordinaire annuelle d’approbation des comptes – AGOA- au cours de laquelle les associés décideront d’affecter les résultats de l’exercice en adoptant une décision relative à la distribution des dividendes.

C’est en effet cette décision des associés prise lors de l’AGOA qui donne une existence juridique aux dividendes.

En dehors de la procédure dite d’acomptes sur les dividendes laquelle fait l’objet d’une réglementation particulière, les associés ne doivent pas toucher de dividendes sans que cela ne fasse l’objet d’une décision adoptée en AGOA.

À défaut, la distribution serait qualifiée de distribution irrégulière laquelle donnerait lieu aux sanctions attachées aux dividendes fictifs.  

En deuxième lieu, les associés peuvent, de façon exceptionnelle, toucher un acompte sur les dividendes sans passer par la voie de l’AGOA. Mais, pour cela, il faut, si la société n’est pas déjà dotée d’un CAC, en désigner un dont la mission sera de certifier un bilan aux fins de permettre aux associés de toucher un acompte sur les dividendes.

En troisième lieu, si la société a décidé de distribuer aux associés des dividendes, il faut songer à la mise en paiement de ces dividendes dont le délai est de 9 mois à compter de la date de clôture de l’exercice social, sauf prorogation dudit délai par décision du Président du tribunal de commerce statuant sur requête.

Enfin, les dividendes sont soumis à régime fiscal qui dépend de plusieurs critères : la société concernée est-elle soumise à l’IR ou à l’IS ? Les dividendes, sont-ils distribués à un associé personne physique ou à un associé personne morale soumise à l’IR ou l’IS ?

Il convient de retenir, somme toute, qu’en présence d’une société soumise à l’IR, c’est, en principe, les associés qui sont imposables et non la société elle-même. On parle à leur égard de sociétés « transparentes fiscalement ».

Écrit par Thierno DIALLO, Responsable juridique chez GT EXPERTISE.

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